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Halifax (Nouvelle Écosse), le jeudi 15 mai 2014
Je suis ravi d’être parmi vous aujourd’hui et je me sens privilégié de recevoir ce doctorat honorifique en droit civil en compagnie d’autres remarquables récipiendaires.
J’ai passé une grande partie de ma vie dans le milieu universitaire, et cette distinction du King’s College revêt une signification particulière pour moi. J’ai été très intéressé d’apprendre que je ne suis pas le premier gouverneur général à recevoir un diplôme honorifique de cette institution. Le duc de Connaught, qui en a reçu un en 1912, a décrit l’établissement comme un pionnier de l’éducation dans ce pays, qui mérite le respect de tous les bons Canadiens.
Voilà qui décrit fort bien le King’s College!
L’histoire de cette université remonte à 225 ans. Imaginez ce que de jeunes Canadiens en 1789 pouvaient éprouver, les leçons auxquelles ils pouvaient assister, les découvertes qui les attendaient. Pendant plus de deux siècles, le King’s College a été témoin des formidables avancées scientifiques qui ont touché l’astronomie, les mathématiques, la génétique, la médecine et la nature même de l’univers.
Et le King’s College et ses étudiants ont su faire preuve de résilience au cours des deux cents dernières années. Prenez par exemple l’incendie majeur de 1920 qui a détruit l’université, qui se trouvait alors à Windsor. La survie même de l’institution était menacée, mais plutôt que d’accepter cette fatalité, la communauté universitaire a lutté pour continuer à vivre. C’est alors que Halifax a accueilli votre alma mater.
Beaucoup de choses ont changé au cours des 225 dernières années — en fait, beaucoup de choses ont changé au cours de la dernière décennie! — mais cela ne devrait être ni surprenant ni inquiétant. Après tout, l’apprentissage et l’évolution se trouvent au cœur même de l’expérience universitaire.
Nous abordons tous l’expérience universitaire avec des idées et des notions préconçues qui sont vite remises en question dans cet environnement stimulant. Certaines de nos convictions s’en trouvent renforcées, mais parfois, l’apprentissage est un facteur de transformation.
Peut-être avez-vous subi une telle transformation devant un cas tellement convaincant, tellement passionnant, que vous n’avez pu faire autrement que d’en être transformé.
Ce peut être aussi simple que de découvrir un nouvel auteur ou d’envisager une nouvelle perspective historique, ou aussi important que de remettre en question tout son cheminement de carrière. Quelle que soit l’ampleur de la transformation, l’expérience de l’apprentissage est aussi captivante pour les étudiants qu’elle ne l’est pour les professeurs.
L’éducation est habilitante, et l’une des récipiendaires honoraires d’aujourd’hui nous en donne une interprétation des plus touchantes. Je parle bien sûr de Malala Yousafzai.
J’espère que les autres récipiendaires sur la scène me pardonneront de me concentrer sur Malala, mais son histoire est éloquente et témoigne de l’importance que revêt l’éducation pour toutes les sociétés.
Aujourd’hui, nous connaissons tous un peu son histoire. Cette jeune femme a généreusement risqué sa vie pour s’exprimer à propos de l’importance de l’éducation, particulièrement pour les filles.
Pour nous qui sommes ici aujourd’hui, il est difficile d’imaginer ce que serait la vie si on nous enlevait notre droit à l’éducation. Mais pour Malala, c’était une réalité et elle était déterminée à faire changer les choses. Elle nous a rappelé que l’éducation est un droit inaliénable pour lequel il vaut la peine de prendre tous les risques.
Dans son allocution devant les Nations Unies l’année dernière, Malala a déclaré : « Brandissons nos livres et nos crayons. Ce sont nos armes les plus puissantes. Un enfant, un enseignant, un crayon et un livre peuvent changer le monde. L’éducation est la seule solution. »
Nous avons beaucoup à apprendre de cette jeune femme. Et, soit dit en passant, si elle n’est pas physiquement présente ici aujourd’hui, c’est qu’elle n’a pas voulu interrompre ses études. Je pense que cela en dit très long sur sa motivation à s’instruire.
Je suis également ravi de savoir que le King’s College lancera la bourse du Canada Malala Yousafzai, pour donner aux jeunes femmes des nations en développement une occasion qu’elles n’auraient pas autrement. Voilà l’essence du message de Malala — et celui du Canada.
Une éducation de qualité — comme celle que vous avez reçue au King’s College — peut nous aider à croître en tant que personne, à raffermir notre confiance dans nos convictions et nos connaissances.
Cependant, ce que vous ferez de vos convictions et de vos connaissances lorsque vous sortirez d’ici, c’est à vous d’en décider.
Quoi que vous fassiez plus tard, où que vous vous retrouviez, je vous encourage à redonner à autrui dans la mesure du possible. J’ai eu l’occasion de constater directement quelques-uns des moyens admirables employés par de jeunes Canadiens pour faire de ce pays un endroit où il fait bon vivre.
Permettez-moi de vous raconter une histoire.
Lorsque j’étais doyen de la faculté de droit à l’Université Western, je me faisais un devoir d’être la première personne à m’adresser à la nouvelle cohorte de 150 étudiants. Je leur disais : « Vous embrassez une noble profession – le droit – et cette profession repose sur une relation de confiance, qui est le fondement de la justice dans notre société ».
Un moyen de susciter la confiance est de laisser place à la compassion dans son travail. Plus précisément, j’encourageais les étudiants à prendre 10 p. 100 des causes de leurs clients de manière bénévole.
Et au fil des ans, quand j’avais l’occasion de parler à ces diplômés au sujet de leur pratique professionnelle, beaucoup d’entre eux me disaient :
« Monsieur le Doyen, je n’ai tout simplement pas été en mesure de donner 10 p. 100 de mon temps, mais les 2 ou 3 p. 100 que j’ai pu donner ont toujours été les plus satisfaisants. »
J’adore cette histoire et j’aime ce qu’elle révèle sur la nature humaine et sur notre expérience du don de soi. Non seulement le fait de donner fait une différence dans la vie des autres, mais cela signifie également beaucoup pour nous. Une telle générosité donne lieu à une merveilleuse réciprocité du don, à la création d’un cercle vertueux.
Pour moi, il ne fait aucun doute que vous laisserez tous votre empreinte sur la société canadienne.
Vous tous, ici rassemblés, devez une fière chandelle à ces premiers étudiants du King’s College, qui sont entrés à l’université il y a 225 ans remplis d’espoirs, de rêves et d’idéaux. Si cette première cohorte était modeste, les aspirations des étudiants ne l’étaient pas. Et par la suite, tant dans les années de vaches maigres que dans les années fastes, ces jeunes Canadiens ont redonné à leur communauté, consolidant la réputation de la côte Est du Canada comme un lieu d’études novateur et transformationnel.
J’aimerais vous laisser aujourd’hui avec le même message que j’ai transmis à d’innombrables jeunes d’un bout à l’autre du Canada. Certains diraient que vous êtes les chefs de file de demain. Mais ce n’est pas le cas. Vous êtes déjà des chefs de file. Vous avez une influence sur le Canada, vous faites bouger les choses.
Que vous choisissiez de poursuivre vos études ou d’entrer sur le marché du travail, que vous restiez à Halifax ou que vous déménagiez dans une autre province ou un autre pays, je sais que vous emporterez avec vous tout ce que vous avez appris ici.
Utilisez vos talents, votre passion, vos connaissances, votre bonté, votre créativité, utilisez tout ce que vous avez à votre disposition pour faire le bien en ce monde. Parce que quand vous faites le bien, quand nous le faisons tous – nous contribuons à bâtir une société plus juste, avertie et bienveillante.
Merci et bonne chance à vous tous et toutes.
