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Toronto (Ontario), le samedi 7 juin 2014
Merci de m’avoir invité à prendre la parole à cette importante conférence. Je suis enchanté d’être en compagnie d’un si grand nombre d’amis, d’hier et d’aujourd’hui.
En cette occasion, je poserais trois questions concernant l’apprentissage et l’innovation au Canada, en Inde et aux États-Unis.
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Pouvons-nous, dans nos pays respectifs, assurer tout à la fois l’égalité des chances et l’excellence?
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Quel est le rôle de nos établissements postsecondaires à ce chapitre?
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À titre de diplômés et de partisans des IIT, que pouvons-nous faire pour favoriser l’égalité des chances et l’excellence?
Vous avez remarqué que je parle de « nous », car je m’inclus comme fier partisan des IIT.
Lors de ma visite d’État en Inde, plus tôt cette année, j’ai été ravi de visiter l’IIT-Bombay et d’être invité à passer en revue, à titre d’intervenant externe, le plan stratégique établi à l’occasion du 50e anniversaire de cet institut. De plus, dans mes fonctions antérieures de président de l'Université de Waterloo, et auparavant à l'Université McGill, j'ai signé un certain nombre d’ententes de partenariat avec les instituts indiens de technologie, de sorte que j’ai été à même de constater la qualité exceptionnelle de l’éducation qu’ils offrent.
Je passe maintenant à la première question, à laquelle je réponds par l’affirmative : nous pouvons assurer tout à la fois l’égalité des chances et l’excellence, et les considérer comme des valeurs non pas en concurrence, mais complémentaires.
La réponse est simple, si l’égalité des chances consiste à faire en sorte que tous les membres d’une société puissent exploiter pleinement leurs talents et que, ainsi outillés, ils aient la chance de mettre leurs aptitudes au service de l’amélioration de la condition humaine.
Et, évidemment, en tirant parti des talents de tous les membres de la société — riches ou pauvres, hommes ou femmes — nous pouvons puiser dans un bassin bien plus vaste pour mener notre quête de l’excellence.
De plus, quand l’excellence est encouragée, les innovations qui s’ensuivent nous apportent de nouveaux moyens de favoriser l’égalité des chances.
Toutefois, pour parvenir à l’un et à l’autre de ces objectifs, il faut un leadership humain empreint d’ardeur, d’innovation et de désintéressement. Voilà le message fondamental que je souhaite vous transmettre aujourd’hui.
Voyons maintenant la deuxième question, qui touche le rôle joué par les universités et les instituts d’apprentissage.
Au Canada, les valeurs complémentaires que sont l’égalité des chances et l’excellence ont été promues des plus efficacement par le système public d’éducation, lequel est très facile d’accès et de grande qualité.
Parmi les pays d’expression anglaise, le Canada, en ce qui a trait à l’enseignement primaire et secondaire, arrive en tête selon l’évaluation PISA de l’Organisation de coopération et de développement économiques, l’OCDE, quant au rendement des enfants de 9, 12 et 15 ans. Le Canada affiche également le plus fort pourcentage d’adultes ayant fait des études supérieures au sein de l’OCDE, et le plus haut taux de participation à l’échelle des établissements postsecondaires.
Une étude de l’OCDE qui est particulièrement intéressante selon moi classait les pays membres en fonction de l’accessibilité, c’est-à-dire qu’elle indiquait dans quelle mesure les enfants atteignaient ou dépassaient les niveaux de scolarité de leurs parents.
Le classement a été présenté par quintiles. Or, il s’avère que pour 80 p. 100 des étudiants représentant la tranche supérieure, le Canada se situait au premier rang quant au nombre d'étudiants qui avaient égalé ou surpassé le niveau de scolarité de leurs parents. Cependant, en ce qui concerne les 20 p. 100 restants, il se situait dans le tiers inférieur. Donc, la situation est très bonne d’une part et mauvaise d’autre part.
Dans le milieu de l’enseignement postsecondaire en Inde, les IIT font histoire. Ces établissements sont les plus exigeants du monde et, par conséquent, ils définissent une norme mondiale d’excellence bien unique. Néanmoins, l’Inde doit se doter d’un plus grand nombre d’établissements de grande qualité pour continuer à fixer la norme et pour renforcer les capacités dans l’ensemble de son système d’éducation, afin d’accroître radicalement l’accessibilité de l’éducation.
Le défi est de rehausser l’excellence tout en favorisant bien davantage l’égalité des chances.
Mais comment pouvons-nous contribuer à la réalisation de tels objectifs en Inde et en Amérique du Nord? C’est ce qui m’amène à ma troisième question, au sujet du défi qui vous attend, vous les diplômés des IIT.
À cet égard, j’aimerais aborder trois points.
Premièrement, j’oserais dire que vous êtes les intendants de l’IIT d’où vous êtes issus.
Je m’explique. J’ai été vice-chancelier pendant 27 ans. Avant de clore chaque cérémonie de remise des diplômes, je demandais aux étudiants à qui appartenait l’université. À personne, me répondait-on, évidemment. Pourtant, vous avez passé quatre ans de votre vie à acquérir des connaissances transmises par l’université et à contribuer à son bien-être, de sorte que vous en êtes désormais les intendants et les représentants. En qualité d’intendants, il vous revient donc d’améliorer l’établissement qui vous a accueilli, de lui rendre ce qu’il vous a donné. Il vous revient de l’améliorer au profit des étudiants qui suivent vos traces. La communauté vous a appuyés et les contribuables ont montré qu’ils vous faisaient confiance en investissant largement dans votre avenir. Alors, pensez au secteur public, votez aux élections et efforcez-vous de changer les choses.
Deuxièmement, je vous dirais qu’en tant que diplômés d’un IIT, vous pouvez influencer ce dernier en vue de renforcer les capacités dans votre pays.
Pour ce faire, il s’agit d’abord de s’inspirer de l’excellence qui caractérise les IIT d’origine pour édifier d’autres établissements indiens voués à l’excellence. Ensuite, de diplômer une multitude d’enseignants, de chercheurs et de chefs de file du milieu universitaire qui travailleront dans ces établissements. Enfin, de les inciter à placer sous le sceau de la collaboration l’enseignement, la recherche et le transfert de technologie, pour que tous en profitent.
Troisièmement, en tant que diplômés des IIT, vous devez promouvoir la mondialisation et l’adoption d’une perspective internationale. Vous devez encore chercher à nouer des accords entre les IIT et les établissements canadiens et américains.
Les écosystèmes que constituent le renforcement des capacités, la recherche collaborative et le transfert de technologie sont tous des exemples des moyens que nous pouvons prendre pour nous entraider. Et rappelez-vous les débuts des IIT : chaque institut s’associait à un partenaire étranger et adaptait les meilleures pratiques comparables à sa réalité nationale.
Nous devons encourager les stratégies internationales ambitieuses. Je vous en mentionnerai deux qui touchent le Canada.
La première est exposée dans un rapport préparé par Amit Chakma, président de l’Université Western Ontario et président du Comité consultatif sur la Stratégie du Canada en matière d’éducation internationale, qui préconise que l’on double le nombre d’étudiants internationaux au Canada d’ici 2022 et que l’on hausse considérablement le nombre de Canadiens qui vont étudier à l’étranger.
Je vous en cite un passage. « Notre vision pour le Canada : devenir le chef de file […] en éducation internationale afin d’attirer les meilleurs talents et de préparer nos citoyens au marché mondial, de façon à établir des bases solides pour assurer notre prospérité future. »
Je vous signale en passant que M. Chakma est venu du Bangladesh faire des études supérieures au Canada, où sa famille élargie l’a suivi. Son fils aîné vient tout juste de publier un article dans la revue Nature.
La deuxième stratégie internationale qui touche le Canada est associée à Dominic Barton, un Canadien qui est directeur général des affaires internationales au sein de McKinsey & Company. Il a dirigé récemment une étude de McKinsey qui illustre en quoi l’internationalisation de l’éducation, ou ce que j’appelle la diplomatie du savoir, peut être avantageuse pour les nations.
En terminant, j’insiste sur l’importance du leadership personnel, qu’il s’agisse de donner autant que de recevoir, dans la concrétisation de l’égalité des chances et de l’excellence en éducation — le cadeau qui en entraîne un autre.
Je vous remercie.
