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Ottawa (Ontario), le lundi 7 juillet 2014
SOUS RÉSERVE DE MODIFICATIONS
Merci de me recevoir aussi chaleureusement. Au nom de tous les Canadiens, je suis reconnaissant d’avoir l’occasion de m’adresser à un auditoire aussi important, et je suis ravi que le Canada ait la chance d’être l’hôte de la 40e session de l’Assemblée.
Permettez-moi d’abord de souhaiter la bienvenue à ceux d’entre vous qui sont venus de loin pour participer à cette rencontre ici, à Ottawa. Je vous remercie de vous être déplacés pour partager vos perspectives uniques sur les difficultés et les possibilités politiques, sociales, économiques et culturelles des collectivités francophones de partout dans le monde.
J’aimerais également saluer la contribution du secrétaire général Diouf, qui approche la fin de son mandat et dont le leadership au cours des 12 dernières années a été remarquable.
Votre Excellence, vous avez fait preuve d’un grand dévouement envers la démocratie, le respect des droits de la personne et la saine gouvernance, et vous avez été un phare de cette institution. Au cours de votre mandat, la Francophonie est devenue un acteur de plus en plus important dans les relations internationales, et son influence s’est ressentie à grande échelle.
J’aimerais aborder aujourd’hui trois thèmes principaux.
Tout d’abord, j’aimerais attirer votre attention sur les grands efforts déployés par les Canadiens français en vue d’instaurer la langue et l’identité françaises au Canada.
Ensuite, je souhaiterais expliquer pourquoi cette contribution est si importante et en quoi elle soutient le Canada.
Puis, j’aimerais parler de la façon dont le Canada et la Francophonie peuvent paver la voie vers un monde plus averti, bienveillant et inclusif.
Les Canadiens français ont instauré le français comme l’une des deux langues officielles du Canada, et ont établi la langue et l’identité françaises dans ce pays.
Cette réalisation n’est pas arrivée par accident. En effet, le Canada est une nation en partie francophone grâce à la passion, au dévouement et à la détermination des Canadiens français envers leur langue, leur culture et leur patrimoine.
Les francophones se sont taillé leur propre place. Ils ont travaillé sans relâche afin de bâtir et de façonner leur pays. Et ils continuent de contribuer à la croissance et la réussite du Canada dans toutes les régions du pays.
Ils ont mené une lutte acharnée, compte tenu de la prédominance considérable de l’anglais en Amérique du Nord.
La langue et la culture françaises au Canada forment un riche patrimoine en constante évolution. Ce patrimoine a contribué à établir certaines des forces fondamentales du Canada, soit l’inclusion et le respect des différences, ainsi que la richesse et la résilience issues de la diversité.
Je pourrais donner de nombreux exemples de Canadiens français dont le dévouement soutenu à leur langue et leur culture a permis de faire du Canada un meilleur pays. Permettez-moi de donner un exemple local de la lutte pour les droits linguistiques dans notre histoire.
Il y a un peu plus de cent ans, un groupe franco-ontarien a dirigé avec succès la lutte pour les droits à une éducation bilingue dans leur province. Les manifestations ont eu lieu à l’école primaire Guigues, sur la rue Murray, à Ottawa, à quelques coins de rue d’ici!
Ce mouvement s’est formé en réaction au Règlement 17, une loi provinciale qui imposait des restrictions rigoureuses sur l’éducation en français. Les protestations des parents francophones, des professeurs et des dirigeants de la communauté ont forcé le gouvernement de l’époque à revoir sa politique. Plusieurs années plus tard, les écoles bilingues étaient officiellement reconnues en Ontario.
Nous sommes chanceux que ces parents et ces éducateurs se soient ralliés à cette cause. Grâce au travail acharné des nombreux francophones dévoués et passionnés provenant d’un bout à l’autre du Canada, la langue française demeure bien vivante au pays.
Cette histoire me permet d’aborder un deuxième point de vue : la façon dont la vitalité des communautés françaises et francophones renforce le Canada.
Cela est dû au fait que le français représente une autre façon d’échanger, et que la culture francophone nous offre une autre façon d’occuper notre place dans le monde.
Comme l’a déjà dit ma prédécesseure, la très honorable Michaëlle Jean, « la langue française est beaucoup plus qu’un héritage. C’est un espace de rencontre. Un espace de partage. Un espace de fraternité. C’est aussi et surtout une façon de célébrer et de propager une vision singulière du monde qui se décline en une multitude d’accents, d’histoires et d’expériences. »
Nous sommes chanceux de pouvoir profiter de la présence de la langue, la culture et le patrimoine francophone au Canada. Le français représente une richesse à de multiples égards.
Permettez-moi de vous parler de la petite ville de Gravelbourg, dans le sud de la Saskatchewan.
Gravelbourg est une communauté multiculturelle fière et dynamique située dans les Prairies canadiennes. L’Association communautaire fransaskoise de Gravelbourg existe depuis plus de cent ans. Elle a fait un important travail pour célébrer et renforcer la présence francophone en Saskatchewan.
Un de mes bons amis et anciens collègues vient de Gravelbourg.
Son nom est Paul-André Crépeau. Il est malheureusement décédé il y a trois ans. Nous nous sommes rencontrés à l’Université McGill à Montréal, où il étudiait et faisait connaître le droit civil et la tradition civile d’inspiration française.
Le professeur Crépeau a dirigé l’équipe chargée de moderniser le Code civil du Québec, y compris la protection des libertés civiles. Il a ensuite apporté sa précieuse contribution à la révision du Code Napoléon en France.
Il figurait parmi les plus éminents chercheurs en droit civil, l’une des deux plus importantes traditions juridiques de la civilisation occidentale avec le droit coutumier anglo-saxon. Grâce à la culture française, ces deux droits sont pratiqués au Canada.
Tous les Canadiens s’inspirent de personnes telles que Paul-André et de très petites communautés, telles que Gravelbourg, afin de s’assurer que la tradition française rayonne dans un océan anglophone. Ces communautés sont inclusives, essentielles et tournées vers l’avenir, autant de qualités qui font des Canadiens de grands citoyens, et du Canada, un grand pays.
Bien sûr, de nombreuses grandes villes canadiennes outre Québec comptent d’importantes populations francophones : Winnipeg, Sudbury et Moncton, par exemple.
Et, bien sûr, dans la grande province de Québec, nous pouvons compter Montréal, la ville de Québec et de nombreuses autres communautés francophones dynamiques et fières.
À partir des exemples de ces communautés, passons au troisième thème que je voulais aborder, c’est-à-dire : la façon dont la Francophonie peut mener à un monde plus averti, bienveillant et inclusif.
Vous connaissez peut-être l’ouvrage intitulé « Why Nations Fail », coécrit par Daron Acemoglu et James A. Robinson, de MIT et de l’Université Harvard, respectivement. Leur travail est axé sur l’importance de l’égalité et l’inclusion pour la prospérité d’un pays.
Le message principal de cet ouvrage est que les sociétés dont l’économie et les politiques sont inclusives sont prospères et renforcées, tandis que les sociétés exclusives s’en voient affaiblies et appauvries.
Les sociétés qui incluent tous leurs citoyens en leur donnant la chance d’utiliser leurs talents et de saisir les débouchés ont de bien plus grandes chances de réussir que celles qui excluent certains citoyens en fonction de leur race, leur origine ethnique, leur classe sociale, leur genre et leur langue.
Le français est un élément intrinsèque de la société canadienne, et le bilinguisme fait partie intégrante de l’inclusion qui caractérise le pays. La capacité des Canadiens français à vivre et à travailler en français est un facteur fondamental qui permet à notre pays d’accéder à leurs talents et à leur dynamisme et, ainsi, de réussir.
Cette ouverture à la diversité, c’est-à-dire notre valeur d’inclusion, est l’une des plus grandes forces du Canada.
Les efforts soutenus pour utiliser notre bilinguisme et notre adhésion à la Francophonie dans le but d’accroître l’inclusion sont particulièrement importants de nos jours, compte tenu du contexte mondial d’aujourd’hui.
Nous vivons dans un monde étroitement connecté et dans lequel la réussite des pays dépend avant tout de leurs liens avec les réseaux internationaux, et non de leur position hiérarchique par rapport aux autres.
Ensemble, nous devons établir des réseaux internationaux et les renforcer si nous voulons bâtir le monde averti et bienveillant dont nous rêvons tous.
Chacun d’entre vous comprend la valeur des réseaux dans le monde d’aujourd’hui. En tant que membres de l’Assemblée parlementaire de la Francophonie, vous vous êtes rassemblés au nom de votre nation respective et des cultures francophones partout dans le monde.
Et plus tard cette année, vous vous réunirez de nouveau dans le cadre du 15e sommet de la Francophonie à Dakar afin de nommer le successeur du secrétaire général Diouf et d’élaborer la feuille de route de la Francophonie pour les années à venir.
Je suis reconnaissant de vos efforts, et tous les Canadiens le sont également. Le français occupe une place très spéciale au Canada, et notre appartenance à la communauté francophone internationale améliore nos vies de multiples façons.
Quelle leçon pouvons-nous tirer de ces perspectives et ces exemples? Que la persévérance, l’inclusion, la richesse et la santé des collectivités sont le fruit de la diversité et d’une perspective mondiale.
Comme je me plais souvent à le dire, l’esprit est comme un parachute : il fonctionne mieux lorsqu’il est ouvert.
Les Canadiens français et les francophones d’ailleurs incarnent ces qualités et, grâce à celles-ci, donnent l’exemple pour les autres cultures et nations de ce monde.
L’Assemblée parlementaire de la Francophonie incarne également ces qualités et, grâce à celles-ci, elle contribue à bâtir le monde plus averti et bienveillant que tous souhaitent.
Je vous remercie tous de vos efforts en vue de renforcer la langue et la culture francophones.
Je vous souhaite beaucoup de succès.
