Assemblée générale annuelle de la Banque alimentaire d’Ottawa

Ce contenu est archivé.

Ottawa, le lundi 17 janvier 2011

 

Bonsoir. Je vous remercie de m’avoir invité à votre assemblée générale.

Je suis ravi de pouvoir vous parler des piliers sur lesquels s’appuient mes efforts en tant que gouverneur général, des efforts qui visent à encourager le bénévolat et la philanthropie, mais qui sont également axés sur l’appui aux familles et aux enfants et sur l’accroissement de l’apprentissage et de l’innovation. Ces trois piliers peuvent sembler distincts l’un de l’autre, mais en fait, chacun est lié aux autres.

Je vous demanderais tout d’abord de réfléchir à ceci : Combien parmi nous se sont levés ce matin comme tous les autres matins? Combien parmi nous se sont machinalement versé une tasse de café? Combien parmi nous ont déjà acheté plus de nourriture que nécessaire pour, finalement, la voir se gaspiller?

En tant que parents, mon épouse Sharon et moi avons enseigné à nos filles la valeur de la nourriture que nous leur servions. Nous leur avons montré l’importance de manger sainement et d’apprécier ce qu’elles avaient. Nous les avons également élevées en leur démontrant le pouvoir du don.

Vous tous ici présents — que vous soyez des bénévoles, ou ceux qui appuient la Banque alimentaire d’Ottawa ou qui en bénéficient — vous comprenez la valeur d’une chose aussi simple qu’une boîte de conserve de soupe ou qu’une boîte de craquelins. Vous savez à quel point un repas équilibré peut réconforter les plus démunis.

Vous avez aidé des milliers de femmes, d’hommes et d’enfants à travers la région d’Ottawa. Il y a tant de refuges, de centres et de familles qui comptent sur vous pour un besoin élémentaire que la plupart d’entre nous tiennent pour acquis. C’est la raison pour laquelle Charity Intelligence Canada, qui analyse les organismes de bienfaisance, a recommandé le vôtre dans sa liste pour l’année 2010. Je vous félicite pour cette reconnaissance que vous avez obtenue et qui vient confirmer la qualité du travail que vous accomplissez pour Ottawa et pour le pays.

Maintenant que nous avons entamé l’année 2011 qui, soit dit en passant, est le 10e anniversaire de l’Année internationale des volontaires, et que nous nous approchons de 2017, année du 150e anniversaire de la Confédération, je vais continuer de parler de la façon dont j’envisage notre édification d’un pays éclairé et bienveillant. Un pays où tous les Canadiens peuvent cultiver pleinement leurs talents. Un pays qui accroît et applique les connaissances de ses citoyens afin d’améliorer la qualité de vie de tous, aussi bien au Canada que dans le reste du monde. Je vous demande donc maintenant de réfléchir à ce que vous feriez pour créer un pays plus éclairé et plus bienveillant.

Durant le centenaire du Canada, Lester B. Pearson avait déclaré qu’aucun autre pays n’était mieux placé que le Canada pour parfaire l’évolution d’un objectif national axé sur la bonté, la noblesse et l’excellence de l’esprit humain.

Ce qu’il a dit n’a rien perdu de son actualité. Nous, Canadiens, pouvons définir notre identité par l’image que nous offrons au monde entier et par notre façon de traiter ceux qui sont dans le besoin.

Je suis convaincu que nous pouvons édifier le pays que nous désirons, en aidant autrui, notamment. Je donne souvent l’exemple de la construction d’une grange chez les mennonites, où les voisins s’entraident en mettant en commun leurs divers talents et leur énergie.

Il en est de même de ce que vous faites ici pour la communauté. Vous mobilisez et motivez vos membres afin de pouvoir aller de l’avant. Vous vous appuyez les uns les autres pour atteindre un but commun. Vous mettez à profit vos compétences et, surtout, votre nature altruiste pour recueillir, trier et distribuer la nourriture.

Vous soutenez des enfants et des familles qui vivent des périodes difficiles.

Près de 40 pour cent de votre clientèle, chaque mois, est constituée d’enfants, ce qui représente un nombre considérable. Il est difficile de croire que, même au Canada, autant d’enfants soient privés de nourriture. Heureusement, grâce à vous, des enfants ainsi que des familles peuvent manger à leur faim et se développer. Grâce à vous, les jeunes d’Ottawa peuvent aller à l’école et apprendre avec énergie plutôt que dans un état léthargique, avec espoir plutôt que dans la désespérance. Vous leur fournissez non seulement un repas, mais également la chance de contribuer d’une manière valable à l’avenir du Canada.

Vous leur montrez ainsi l’importance cruciale d’aider les autres, créant ainsi une nouvelle génération de gens qui auront l’esprit du don.

Pourquoi les Canadiens devraient-ils faire du bénévolat?

Julie Payette a dit un jour : « Le moindre pas, si petit puisse-t-il paraître à quelqu’un, peut représenter beaucoup pour quelqu’un d’autre. Chaque obstacle qu’il nous faut surmonter nous aide à croître. »

Un homme, une femme, un enfant à la fois, les bénévoles font tous une différence dans la vie des gens. D’après l’Enquête canadienne sur le don, le bénévolat et la participation menée en 2007, plus de 12 millions de Canadiens ont consacré plus de 2 milliards d’heures de bénévolat à des causes qui leur sont chères. Qu’il s’agisse de résoudre un problème de pauvreté, de soulager la douleur, de redonner un peu de dignité à quelqu’un ou simplement d’offrir un repas chaud, aucune cause n’est trop grande ou trop petite à laquelle notre pays ne puisse s’attaquer.

Ici, dans cette ville, la Banque alimentaire d’Ottawa sait à quel point les bénévoles sont importants. En 2008-2009, plus de 2 400 bénévoles ont fait don de plus de 20 000 heures de leur temps.

Leur dévouement est encourageant.

Il ne faudrait pas oublier non plus toutes ces personnes et ces entreprises de la région qui ont donné de la nourriture et de l’argent. Leur esprit philanthropique est un autre trait typiquement canadien.

Il existe une seconde définition de la philanthropie, distincte du don tout en y étant liée, qui se traduit par l’amour de l’humanité. Quiconque donne à la mesure de ses moyens, que ce soit une importante somme d’argent ou une boîte de soupe, est essentiellement un philanthrope.

Les entretiens que j’ai eus avec des bénévoles et des représentants d’organismes à travers le Canada m’ont permis d’entendre des histoires de réussite, mais également de mesurer la difficulté pour eux de maintenir l’intérêt de la population envers leurs causes. À cet égard, la Banque alimentaire d’Ottawa éprouve les mêmes problèmes, puisqu’elle doit constamment demeurer dans l’œil du public pour pouvoir continuer à offrir ses services essentiels.

Or, comment est-il possible de maintenir la popularité et la nécessité du don? Comment peut-on encourager les gens à devenir des participants actifs au sein de leur communauté?

L’expérience m’a démontré qu’il est difficile de soutenir l’intérêt des gens dans les activités de collecte de fonds, de sensibilisation du public ou, dans votre cas, de cueillette d’aliments. C’est ici alors qu’intervient mon second pilier, celui de l’apprentissage et de l’innovation. Je sais qu’il est crucial de montrer aux gens quel effet positif votre action a au sein de la communauté et d’avoir une approche ciblée et novatrice pour obtenir du soutien et des fonds.

Grâce à vos campagnes de sensibilisation, vous démontrez comment le fait de ne pas manger à sa faim peut être néfaste et ce que nous pouvons tous faire pour vaincre la faim dans notre collectivité. En éduquant les gens sur les problèmes qui en découlent et en leur montrant ce que vous faites, vous les informez en espérant qu’ils seront incités à agir.

L’éducation de la population est louable, mais il ne faut pas négliger l’importance de l’innovation. L’innovation signifie voir les choses sous un angle différent; découvrir de nouvelles façons de concevoir le bénévolat et la philanthropie et d’atteindre nos buts.

Fort heureusement, nous vivons dans un pays de donateurs. Cela se voit, sur une grande échelle, à leur réponse aux catastrophes qui ont lieu partout dans le monde. Cela se voit également à l’échelle locale. La Banque alimentaire d’Ottawa distribue 14 tonnes d’aliments par jour, ce qui serait impossible sans la générosité et l’empathie de nos concitoyens.

Il ne faut pas oublier que chaque don fait une différence.

Cela me rappelle lorsque mère Teresa est venue à Montréal, il y a quelques décennies. L’une de nos voisines, émue par l’œuvre de cette dernière auprès des pauvres de Calcutta, lui a demandé ce qu’elle pourrait faire pour aider. Mère Teresa lui a répondu : « Vous n’avez qu’à regarder autour de vous. Vous verrez que, dans votre propre quartier, il y a une famille qui a besoin de vos soins et de votre amour. »

Peu de temps après, j’ai lu une critique à l’endroit de l’œuvre de mère Teresa. Son refuge à Calcutta permettait de secourir quelque 200 personnes dans une ville qui en compte des millions qui vivent dans la pauvreté la plus épouvantable. Son travail y était décrit comme n’étant qu’une goutte dans un océan. Quelques semaines plus tard, je me suis rendu compte du fondement erroné de cette critique, qui analysait l’action de mère Teresa du point de vue de la physique, plutôt que de la chimie.

Je m’explique. Mes enfants, alors âgés de 2 et 9 ans à l’époque, critiquaient ma façon de les divertir à l’occasion de leurs fêtes d’anniversaire. Elles me disaient : « Pourquoi ne donnes-tu pas un spectacle de magie comme le fait M. MacFarlane plutôt que de raconter des histoires de fantômes auxquelles personne ne croit? »

En ce temps-là, Andy MacFarlane était le recteur de la faculté de journalisme à l’Université Western et moi, le recteur de la faculté de droit. Étant assez compétitif de nature,  j’ai décidé d’assister à la fête d’anniversaire suivante qui avait lieu chez les MacFarlane, où Andy s’était déguisé en magicien avec une longue cape et de grosses manches bouffantes. Il a commencé à faire un tour de magie au cours duquel il allait transformer l’eau en vin. Prenant un verre d’eau, il l’a soulevé dans les airs et a prononcé le mot magique « Abracadabra! ». Il a ensuite dissimulé le verre sous ses manches et a exécuté une pirouette de 360 degrés, tout en ajoutant quelques gouttes de teinture rouge dans le verre, sans que personne s’en aperçoive. Une fois le verre sorti de sous ses manches, l’eau était devenue d’une belle couleur rose.

C’est à ce moment que j’ai pris conscience de la façon dont mère Teresa changeait la culture de Calcutta, et même celle du monde. C’est la transformation de l’eau, et non ce qui y avait été ajouté, qui améliorait la vie de tant de familles.

D’un bout à l’autre du Canada, les bénévoles agissent dans le même but, celui de transformer leurs communautés par la bonté et la générosité.

L’auteur Bill Sherk a écrit que « Quelqu’un a déjà dit que le plus merveilleux cadeau qu’un être humain puisse offrir à un autre est le bon exemple. »

Non seulement les bénévoles ici présents, de même que tous les bénévoles au Canada, offrent un bon exemple à suivre, mais ils offrent également à des gens une chance d’améliorer leur sort. Une chance de se consacrer à la santé et au bien-être de leurs familles. Une chance de se sortir de situations inimaginables. Une chance de retrouver l’autonomie, la dignité et le respect. Chaque jour, grâce à chaque dollar que vous donnez et à chaque personne que vous aidez, vous créez la nation éclairée et bienveillante que nous pouvons réaliser ensemble, j’en suis convaincu.

Grâce au bénévolat et à la philanthropie, à l’appui aux familles et aux enfants, à l’éducation et à l’innovation, et finalement grâce au service envers autrui, nous sommes en train de créer le Canada de nos rêves.

J’espère que vous profiterez de cette assemblée générale annuelle pour célébrer le succès de l’année écoulée et penser à la multitude de gens que vous avez aidés. J’espère aussi que vous entamez la nouvelle année avec optimisme, en réfléchissant à ce que nous, les Canadiens, pourrions faire de plus pour améliorer davantage nos collectivités.

Je conclus donc en citant Tommy Douglas : « Courage, mes amis; il n’est pas trop tard pour bâtir un monde meilleur. » 

Merci.