25e anniversaire de Vues d’Afrique et de son festival de films Pan-Africa International

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25e anniversaire de Vues d’Afrique et de son festival
de films Pan-Africa International

Montréal, le vendredi 17 avril 2009

Quel plaisir de me retrouver ici, à Montréal, et d’être la marraine des 25 ans d’un festival — pour ne pas dire d’un combat, d’une aventure heureuse et téméraire, «  Vues d’Afrique, c’est tout cela » —  qui rejoint mes racines profondes et auquel me lient tant d’amitié et de moments inoubliables.

« Il s’agit, disait le grand Aimé Césaire peu avant de nous quitter, de rappeler une Afrique oubliée, déformée et moquée. D’en finir avec un exotisme superficiel. »

Ces paroles font écho à la mission que s’est donnée Vues d’Afrique au moment de sa création, et qu’elle poursuit toujours avec passion, audace et conviction : faire connaître dans toute leur richesse et leur diversité les cultures africaines et créoles.

Dans mon île natale, Haïti, j’ai vécu mon enfance dans la culture et la langue créoles. Les réalités et la façon d’être au monde des peuples qui s’en réclament me sont proches.

Quant aux sensibilités africaines, c’est par la littérature mais aussi par le cinéma que je les découvre. Et Vues d’Afrique est ainsi devenu pour moi un rendez-vous incontournable.

Et puis, journaliste, je me suis appliquée à scruter, décortiquer des années durant l’actualité politique, sociale et économique des pays africains, alors que j’animais pour TV5 et la télévision de Radio-Canada l’émission Horizons Francophones.

Il me restait à remonter le fil rouge de la mémoire. Cette mémoire épidermique et sanguine. Cette mémoire qui se révèle au bout d’un simple geste parfois de la main ou qu’un rythme réveille.

Car je n’étais encore jamais allée sur le continent de mes origines, là d’où mes ancêtres ont été arrachés, dépossédés d’eux-mêmes, de leur histoire, de leur culture, de leur langue, de leur nom, et déportés comme esclaves vers des contrées lointaines.

Jusqu’à ce que le destin m’y conduise, à l’occasion d’une visite d’État, la première que j’ai effectuée à titre de gouverneure générale du Canada, et qui m’a menée de l’Algérie à l’Afrique du Sud, et de l’Afrique du Sud au Maroc, en passant par le Mali et le Ghana.

Et l’Afrique m’a marché dans le sang. Sur la route, j’ai découvert une Afrique riche de possibilités, différente de la vision pessimiste qu’on nous en donne trop souvent.

Si des défis énormes se posent toujours à l’Afrique — la pauvreté, la pandémie de sida, la sécurité, le respect de l’intégrité des femmes et des enfants —, cette visite a été pour moi un périple de l’espoir.

J’ai rencontré des femmes et des hommes déterminés à trouver leurs propres solutions aux grands enjeux de l’heure et en marche vers la stabilité, la sécurité, la prospérité et la liberté.

Le 8 mars dernier, je suis retournée en Afrique.

Cette fois-ci à Monrovia, au Liberia, à l’invitation de la présidente du pays, Son Excellence Ellen Johnson-Sirleaf, première femme du continent africain à être élue à la tête d’un État.

J’y étais pour prendre part à un colloque international sur le renforcement des capacités des femmes, le développement du leadership, la paix et la sécurité internationales.

Nous avons été nombreux à répondre à l’appel : chefs d’État, représentants d’organisations internationales et multilatérales, d’ONG et de la société civile, toutes et tous convaincus que si l’avenir de l’humanité passe par les femmes, c’est aussi par elles que viendront les changements sociaux durables. Par toutes ces femmes dont on dit, en Afrique, qu’elles portent leur communauté sur leurs épaules et leurs enfants sur leur dos et contre leur ventre.

Vous savez, s’il est vrai de dire que le monde dans lequel nous vivons connaît une ouverture sans précédent, il est aussi juste de penser qu’il est essentiel de cultiver et multiplier l’accès à la diversité des cultures qui le composent et de leurs modes d’expression.

Sans manifestations comme celle-ci, qui ouvrent notre regard sur l’ailleurs, nous n’aurions de ce monde qu’une vision le plus souvent réductrice, sinon partiale.

Vues d’Afrique a créé ici, dans cette ville cosmopolite, un espace de rapprochement et de dialogue, où s’affiche toute la diversité des cultures africaines et créoles, pour notre enrichissement collectif.

L’art a le pouvoir de transcender les frontières et il réunit ce soir nos cœurs en fête.

Merci, et surtout, longue vie à Vues d’Afrique!