Vernissage de l’exposition DIASPORArt

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Vernissage de l’exposition DIASPORArt

Rideau Hall, le lundi 21 septembre 2009

En moi cohabitent des cultures et des identités multiples.

Sur l’île d’Haïti où je suis née, on comptait une population d’environ un million d’habitants autochtones avant l’arrivée des Européens. Il y avait des Taïnos, des Arawaks et des Caraïbes. Ces premières nations de l’île d’Haïti, ce sont mes ancêtres.

Parmi mes ancêtres, il y a aussi ceux venus d’Afrique, qui ont été transportés de force de ce côté-ci de l’Atlantique pour y être réduits, tout comme les peuples indigènes, à l’état d’esclavage. C’est en Haïti où, au bout de trois siècles de traite infâme, les esclaves ont été les premiers à briser leurs chaînes.

De plus, l’histoire a voulu que j’aie des origines acadiennes, du côté maternel.

Comme vous le savez sans doute, lors de la Déportation, qu’on a aussi appelé le « Grand Dérangement », les Acadiens ont été divisés, embarqués sur les navires et déportés.

Puis ils ont été éparpillés le long de la côte américaine, mais plusieurs villes leur refusèrent l’entrée.

Certains ont été expulsés vers l’Europe, tandis que des centaines d’autres ont repris le large vers l’île de Saint-Domingue, où ils ont émigré. L’île était alors une colonie française dans les Antilles, rebaptisée Haïti, son nom arawak d’origine, lors de son indépendance en 1804.

Cangé LeBlanc, le père de mon arrière-grand-mère, Célia Leblanc, est un descendant des ces Acadiens qui sont arrivés sur l’île en 1763.

Il m’a donc fallu peu de temps après mon arrivée au Canada pour m’apercevoir que j’étais en pays de connaissance.

Je me suis reconnue dans les tambours, les chants, les danses, les langues, les légendes des Premières nations, des Inuits et des Métis, qui ont une parenté, si j’ose dire, avec ceux des premiers peuples de mon île natale.

Je me suis reconnue dans les descendants des esclaves et de ces femmes et ces hommes arrivés ici par le chemin de fer clandestin et dans leur volonté de contribuer à l’édification d’un pays fondé sur des valeurs de justice et de liberté.

Je me suis reconnue dans la résilience des Acadiennes et des Acadiens et leur attachement profond à leur histoire, à leur langue et à leur culture.

Arrivée un soir d’hiver au Québec, dans cette province qui est un berceau de la francophonie, une famille à laquelle j’appartiens par la langue et par le cœur, j’y ai plongé mes racines. Et ces racines sont aujourd’hui des rhizomes qui s’étendent à la grandeur du Canada, un pays que je représente fièrement à titre de gouverneure générale.

Si je vous parle de mon histoire, de mon parcours, c’est qu’ils sont loin d’être uniques sur cette terre de métissage qu’est le Canada, comme le démontre si bien l’exposition DIASPORArt que nous inaugurons.

C’est de cette histoire et de ce parcours, à la fois singulier et collectif, dont nous parlent aussi les artistes canadiens de diverses communautés culturelles qui prennent part à cette exposition et dont les œuvres proviennent de la collection de la Banque d’œuvres d’art du Conseil des Arts du Canada.

Ces artistes nous parlent du chevauchement des appartenances et des identités, du choc des cultures, qui est une source de renouvellement, de traditions et de modernité, de mythes et de réalités, de l’ici et de l’ailleurs, de voyages et d’enracinements, de proximités et de rencontres.

Ils nous disent aussi que tous ces croisements créent des espaces de fraternité, des espaces de solidarité et de rapprochement entre nous et au sein de la grande famille humaine.

C’est donc sous le signe de la rencontre et dans une volonté de partage que s’inscrit cette exposition, à laquelle je souhaite un vif succès.

La diversité culturelle nourrit l’identité et le désir d’expression de nombreux créateurs et créatrices au Canada, et je remercie la Banque d’œuvres d’art de nous permettre de réfléchir avec eux à cette composante essentielle de la réalité et de l’identité canadiennes.

Merci beaucoup.